Pierre Biardeau (1608-1671)

 

Pierre Biardeau occupe une place à part parmi les sculpteurs manceaux. D’une part, il avait quitté Le Mans, où il était né en 1608 d’un père sculpteur— René I Biardeau qui n’est autrement connu que par quelques rares mentions —, et avait établi son atelier à Angers, au milieu des années 1630. Par ailleurs et surtout, son influence fut telle dans cette ville qu’elle y avait suscité l’émergence d’un nouveau foyer artistique, entré bien vite en concurrence avec celui des terracottistes manceaux.

Si le département de la Sarthe ne conserve aucune œuvre connue de cet artiste, ce n’est pas le cas de quelques églises du haut Maine. À Laval, l’église Saint-Vénérand conserve une Vierge à l’Enfant, dite Notre Dame de Bonne Encontre, un Saint Sébastien et un Saint Vénérand qui lui sont attribués et pourraient avoir été exécutés durant le bref séjour du sculpteur dans cette ville, au début des années 1630, avant qu’il ne s’installât définitivement à Angers. De cette période également daterait la Déposition de croix de l’église de Parné-sur-Roc (Mayenne), groupe en ronde-bosse très restauré au XIXe siècle qui provient du couvent des Calvairiennes de la ville de Mayenne.

Les travaux que Biardeau avait exécutés, en 1636-1637, pour les Augustins d’Angers lui avaient ouvert les portes de cet ordre dans plusieurs autres villes, à Poitiers dans le milieu des années 1660, à La Rochelle en 1665, à Montmorillon en 1667. En 1647, il avait composé une quinzaine de sculptures en terre cuite (disparues) pour le couvent des Petits Augustins de Paris, qui furent très admirées des contemporains.

L’artiste avait également été sollicité dans la région de Saumur, où il avait fourni des sculptures au couvent de la Visitation et à la chapelle Saint-René de cette ville, ainsi que dans l’abbaye de Fontevraud, où il avait pris la succession de Gervais I Delabarre, et, enfin, dans l’église des Ardilliers, vaste chantier qui fut pour lui source de déboires et ne fut achevé qu’après sa mort, par le sculpteur tourangeau Antoine Charpentier.

Si un grand nombre de ces œuvres ont disparu ou n’ont jamais été exécutées, ce qui n’est pas le cas des célèbres Saints de la Barre, dans la chapelle d’un ancien manoir, aux portes d’Angers, exécutés entre 1659 et 1664. Cet ensemble constitue un véritable chef-d’œuvre : au centre d’un retable, dessiné par l’artiste, la Vierge tente vainement, d’un geste brusque, d’éloigner l’Enfant du spectacle des instruments de la Passion, une croix et une couronne d’épines que lui présentent deux anges à genoux. La scène est encadrée par les figures très expressives de saint Jean et saint Jacques le Majeur.

Parmi les autres œuvres attribuées à l’artiste, figurent deux grandes statues de la Vierge assise, dans la cathédrale de Poitiers, une autre Vierge, dite Vierge de Nozay, qui ornait autrefois l’autel de la chapelle d’un manoir près d’Angers, un Saint Michel terrassant le démon, dans l’église du May-sur-Èvre (Maine-et-Loire), un Saint Étienne conservé dans le prieuré du Breuil-Bellay, à Cizay-la-Madeleine (Maine-et-Loire), une autre Vierge, très proche de cette dernière, conservée dans le Carmel de Bourges, ainsi qu’une Sainte Julitte et un Saint Paul qui proviennent du manoir de La Roche-Chardonnet, à Neuillé (Maine-et-Loire), où elles formaient naguère un ensemble avec une Vierge à l’Enfant conservée au Metropolitan Museum of Art de New York.

Bien que, dès les débuts de sa carrière, il se fût ainsi éloigné de sa province d’origine, Biardeau aurait cependant maintenu certains liens avec le foyer manceau, dont deux sculpteurs au moins, Noël Mérillon et Nicolas Bouteiller, ont probablement effectué leur apprentissage auprès du maître angevin.



René II Biardeau (1606-1651)
 

À la différence de son frère cadet, Pierre, René II Biardeau, né au Mans en 1606, avait son atelier dans cette ville où il avait pris la succession de l’atelier paternel. Sa mort prématurée en 1651 l’a empêché de conduire une carrière aussi fructueuse que celle de ses collègues et a certainement nui à sa notoriété. Jusqu’à l’acquisition récente, par les musées du Mans, d’une petite Vierge à l’Enfant signée, il n’était connu par aucune œuvre attestée.

La documentation fait toutefois mention de certains de ses travaux. En 1638, il avait exécuté plusieurs statues pour orner les portes de ville du Mans, qui furent enlevées en 1792. En 1643, il avait fourni pour le couvent des Minimes de Sillé-le-Guillaume, trois sculptures dont nous ignorons le détail et qui auraient disparu lors de la fermeture du couvent à la Révolution. Aujourd’hui conservé dans l’église de Sillé-le-Guillaume, un très beau Saint Sébastien — cette commande avait coïncidé avec l’érection, dans le couvent, d’une confrérie dédiée au saint — pourrait en constituer l’unique vestige.